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Mes déséquilibres

- Mes déséquilibres - 4 juin 2016
Avril 2013
Je commence à parler, à travers les amis de mes amis, au gars “hot”, drôle, gentil, attentionné, charmeur.
Celui peut-être un peu “player” pour son âge parce que toute les filles lui cours après. Mais moi j’veux pas être ces-filles-là.
Anyway, il est trop cool pour moi j’ai donc aucune chance.
Fin avril 2013
Ça y est, je suis comme ces-filles-là.
Je sens que ça pourrait enfin marcher avec lui, même si je suis vraiment trop pognée.
Déclaration d’amour mutuelle.
Le début de la fin.
2 mai 2013
Première crise de panique en arrivant à l’école.
Du haut de mes 15 ans, je ne comprends rien.
J’ai mal au coeur. Je suis étourdie. J’ai juste envie de crier.
Mon père, intervenant à l’école où je vais, retourne me porter à la maison.
Arrivée à la maison, mon père parti : je hurle, je pleure, je frappe, je crie, je suis en colère, je suis triste.
Je suis perplexe aussi. Je ne comprends rien.
C’est à partir de ce moment que je commence à développer mon instinct de survie.
Je ne parle de mes incompréhensions à personne.
Je ne suis même pas capable de m’expliquer de toute façon.
A toutes les pauses que j’ai à l’école, tous les dîners, chaque seconde de libre, je les passe dehors.
Je fuis, sans m’en rendre compte, mes problèmes.
À l’intérieur, tout me fait paniquer. Les élèves, les profs, la cafétéria, la salle publique, la lumière même!
Alors qu’à l’extérieur, les 7 milliards de terriens pourraient bien me fixer que ça ne me ferait rien.
Enfin, un remède à mon problème (même si tout le monde me juge parce ce que je cours vers la sortie aux pauses).
Plusieurs épisodes du genre se reproduiront tout au long de l’année 2013.
7 juillet 2013
Je suis en couple de façon officielle, même si tout le monde sait que ça fait plus de 3 mois que je le fréquente.
Il est mon premier baiser, ma première fois, mon premier amour, mon premier espoir.
Nous passerons tout l’été ensemble, à s’aimer comme des ados.
Fin août 2013
Moi qui ADORE l’école depuis toujours, je supplie ma mère de ne pas m’envoyer à l’école.
Je ne fais que pleurer.
Je ne veux pas faire partie de la rentrée scolaire cette année.
Je veux juste m’en aller.
La rentrée m’angoisse tellement.
Je ne veux pas revivre cette ÉNORME source de stress qui me donne la chienne à tous les jours.
Ma mère ne veux pas y croire. Elle ne comprend rien également
“Ils vont t’hospitaliser, te faire passer des tests” qu’elle dit.
Je ne suis pas folle.
J’essaie de m’en convaincre.
Je me rends finalement à l’évidence : j’ai besoin d’aide. Même si mes parents ne l’acceptent pas.
Psychologue #1 : aucun lien de confiance. 100$/heure pour moi qui “feel” mal alors qu’il y a du monde qui souffre pas mal plus, c’est non.
Travailleuse sociale #1 : correcte. Elle est restée plus longtemps que l’autre (4 séances c’est pas dur à battre).
Après environ 7 mois, elle part. Un nouveau poste ailleurs.
Juin 2015
Psychologue #2. Après 6 mois sans consulter, je suis dû.
Il a l’air correct, je lui laisse sa chance. 80$/heure c’est rien!
Mardi soir 18:00, notre rendez-vous quotidien. Ça se passe bien.
Je vois l’automne arriver à grands pas puis j’ai la chienne.
L’automne pour moi c’est la fin de l’été, le retour en classe, le départ de mon chum à 1h30 de chez moi (pour les études).
L’automne c’est la mort de mon grand-père il y a 4 ans, la mort de la nature, le gris et le froid, mais aussi la maladie.
À rajouter à ça, mon couple qui part en vrille et mon chum qui me laisse.
Incapable de supporter plus longtemps les maux.
La dépression m’attaque de plein fouet comme à chaque automne.
Cette fois je m’en rends compte.
En 2 semaines, je perds 10 livres. Normal je fais juste vomir puis dormir.
Je suis tellement stressée. J’ai perdu le contrôle.
Je ne dors pas le soir. Je pleure.
Je pleure tout le temps et je suis incapable de me réveiller le matin.
Je suis étourdie et je cherche à ce qu’on prenne conscience, subtilement, de mon mal de vivre.
Ça marche moyen.
On double les médicaments et augmente les séances de thérapie.
À chaque fois que je pense avoir touché le fond, je m’enfonce un peu plus.
Même si le débat autour des antidépresseurs est toujours très controversé, ceux-ci m’ont sauvé la vie.
Je ne croyais pas à la médication au début, mais les effets (réels ou placébos) se font sentir.
16 mai 2016
Aujourd’hui, je vais étrangement bien. Depuis très (trop) longtemps.
Un peu de répit ça fait du bien.
Cependant si j’avais écrit ce texte dans une «mauvaise phase», comme il y a 4 mois, celui-ci ne se finirait pas sur une note aussi joyeuse.
J’ai beaucoup travaillé sur moi et je suis consciente que j’ai beaucoup évolué à travers ces obstacles.
J’ai souvent penser ne pas m’en sortir.
Enfin je vois la fin.